La dimension éthique de l'humour

 


La dimension éthique de l'humour

« Si j'avais, par aventure, à écrire un traité de morale, je mettrais la bonne humeur au premier rang des devoirs »   

Emile Chartier, 

dit Alain

L'humour témoigne d'une attitude morale caractérisée par un détachement amusé et critique envers soi, les autres et le monde qui nous entoure dans tous ses sens , de l’humour y compris !

D'aucuns parlent même d'une forme élevée de sagesse.

Derrière sa légèreté apparente, sa désinvolture, se cache cependant  un sens aigu de la fragilité et de la relativité des choses humaines.

Le regard non conformiste qu'il porte sur le monde sort des sentiers battus du prêt-à-penser, interroge les habitudes, étonne, dérange même parfois. Sa verve typique reste éthique, y compris lorsqu'elle se moque de la morale et des morales, avec grand et petit M.

Façon amusante d'appréhender le réel, certes, mais aussi, et surtout, manière d'être, de vivre et de se comporter, seul, avec d'autres, en société.

Chez ceux qui le pratiquent et l'estiment à sa valeur, il s'accompagne généralement d'autres qualités morales appréciées et appréciables: l'humilité, la modestie (car c'est vanité que de s'accorder trop de valeur ou d'importance), la lucidité et la tolérance.



On ne l'entend pas assez dire : l'humour, le vrai et le fraternel tout du moins,  constitue, et y participe de tout ce qu’il est et représente,  un « eudémonisme » , cette doctrine philosophique qui pose comme principe fondamental que le bonheur est le but de la vie humaine et qui se fonde sur une confiance générale en l'être humain restant la clé irremplaçable de l'humanisme.

Le bonheur selon celle-ci est la grande finalité de la vie et le rire représente un moyen privilégié pour y parvenir.

Un  eudémonisme hédoniste, donc.



Cela dit, personne n'a jamais soutenu que le sens de l'humour donnait un sens à la vie, mais il aide « drôlement » à la supporter quand tout se complique ou semble dériver de mal en pis.

Distanciation critique, il prend le parti «d'en rire pour ne pas en pleurer». « L'humour, c'est quand on rit... quand même ! ».

 Et Jean Anouilh d'ajouter : « Rire consiste, non à rire “parce que”, mais à rire “malgré” ».

 L'humour, on en conviendra, n'est pas une panacée, mais il peut néanmoins métamorphoser la peine et la tristesse en joie, la désillusion en comique, le désespoir en sourire, la malchance en gaité.

Voilà pourquoi plusieurs philosophes, et parmi les plus grands, en ont fait une vertu que nous aurions tout intérêt à cultiver.

Tous, cependant, ne s'entendent pas sur la valeur de l'humour.

Malgré l’opacité presque totale des idéologies qui se dressent devant nous, l’humour éthique laisse présager qu’un monde plus juste est réalisable et peut nous faire comprendre que la souffrance sociale n’a pas à être éternelle.

 Il nous donne par le fait même le courage de continuer et de poursuivre notre chemin vers le haut et parfois avec résilience.

Dans un contexte où la vie est de plus en plus malade, l’humour éthique voudrait être l’un des ingrédients essentiels dans la composition du remède.


Notre fragilité individuelle et collective, plutôt que d’être accentuée et méprisée par la rigidité de la société, peut devenir une force éthique, un appel à repenser la communauté

Car, le corps du rire n’est jamais dissociable d’un Corps collectif, c’est une chambre d’écho de la communauté à laquelle appartiennent les faiseurs de rires et les rieurs, de la relation que les corps entretiennent les uns avec les autres  

Cependant, si le rire peut tendre sans cesse vers cette communauté rêvée et toujours introuvable, il peut tout aussi bien mal tourner et laisser place à une sorte de sentiment de supériorité qui l’emporte et fait disparaître l’autre, tant on l’a réduit à une infériorité et rendu infirme  .

L’humour éthique, pour éviter ce piège, en appelle à notre grandeur collective tout en favorisant une sensibilité à la souffrance.

Faire éclater ensemble nos corps dans le rire ou déjouer les attentes de l’entendement par la surprise de l’humour ne nous sauve pas, mais dessine les contours d’une communauté.



Le rire vient alors saluer la reconquête d’une reconnaissance mutuelle, d’un partage possible, d’une transmission à venir). L’humour éthique est un « Memento mori »  (locution latine qui signifie « souviens-toi que tu vas mourir ») qui exprime la vanité de la vie terrestre et  se réfère à l'« art de mourir », (ou « Ars moriendi ») en induisant une éthique du détachement et de l'ascèse, proche d'une autre locution latine : « Sic transit gloria mundi » (« Ainsi passe la gloire du monde »).

Il nous rend ainsi une certaine énergie vitale souvent perdue  un minimum de joie pour éviter la résignation définitive.



Etienne Moulron

Parcours et oeuvres

https://moulrone.blogspot.com

Fondateur de la Maison du Rire et de l'Humour

https://mahuarbu.blogspot.com

et Créateur du " Prix Humour de Résistance"

http://lephare1.e-monsite.com/pages/prix-humour-de-resistance/le-prix-humour-de-resistance.html

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